Nicolas Sarkozy, dans son discours d'intronisation par l'UMP à la candidature à l'élection présidentielle le 14 janvier 2007 à Paris, a tenté de dire un mot sur tous les sujets possibles, et parmi ces sujets les rédacteurs de son discours ont pensé à parler des droits des femmes. Loin d'être une prise de conscience inattendue, cette approche des questions de genre se révèle être une véritable instrumentalisation des combats féministes:
"...Je veux être le Président de la France des droits de l’homme ( sic! )
. Chaque fois qu’une femme est martyrisée dans le monde, la France doit se porter à ses côtés. La France, si les Français me choisissent comme Président, sera aux côtés des infirmières bulgares condamnées à mort en Libye. Elle sera aux côtés de la femme qui risque la lapidation parce qu’elle est soupçonnée d’adultère. Elle sera aux côtés de la persécutée qu’on oblige à porter la burka, aux côtés de la malheureuse qu’on oblige à prendre un mari qu’on lui a choisi, aux côtés de celle à laquelle son frère interdit de se mettre en jupe. Aux côtés de l'enfant que l'on vend ou que l'on exploite..."Nicolas Sarkosy, Paris le 14 janvier 2007
-> Discours complet : Cliquer ici. A la lecture de ce passage, d'autant se diront que c'est très une adhésion appuyée aux thèses féministes que d'affirmer vouloir "protéger" les femmes en danger. Mais en y regardant de plus près, c'est surtout un sens raciste et xénophobe qui ressort de ces propos.
Quand Nicolas Sarkozy parle des femmes qui subissent la domination de genre, il ne voit que les femmes musulmanes, des femmes lointaines victimes de systèmes arriérés ; sans les citer nommément il décrit clairement les sociétés musulmanes comme intrinsèquement inégalitaires et oppressives (Libye, burqa, mariage forcé...). À l'entendre nous vivons dans un monde égalitaire alors que les "autres", les musulmans en l'occurrence, ne sont que des barbares machistes.
Et d'après le dirigeant de l'UMP, les seuls problèmes rencontrés par des femmes en France, logiquement, c'est uniquement dans les banlieues populaires qu'on les rencontrerait. Sarkozy tient un discours où l'altérité est un miroir monstrueux brandi pour mettre en valeur l'exemplarité d'une France "civilisée", cette France qui serait mise en danger par un véritable "ennemi intérieur" sauvage et inadapté qui mettrait à mal les fondements de la République.
Il désigne "l'autre", comme il l'a toujours fait, pour mieux le discriminer, il utilise la figure de "l'étranger", qu'il agite comme un épouvantail inquiétant, pour nous effrayer et dans un même temps pour nous rassurer sur notre degré de civilisation. Selon Sarkozy l'étranger est un ennemi en puissance, ennemi "là-bas" et ennemi intérieur "ici".
Non seulement ses propos sont une insulte aux combats féministes menés ici pour changer un système hétéropétriarcal qui régit nos vies, mais en plus ils sont emplis de relents patriarcaux, paternalistes post-coloniaux et racistes.
Et pour finir son chapitre, toujours dans cette logique de genre très personnelle, Sarkozy associe le sort des enfants à celui des femmes, les reléguant ainsi tou-te-s à un rang d'êtres fragiles, victimes en puissance ; il confirme ainsi sa vision conservatrice de la société et non une conception libérale qu'il prétend promouvoir.
À croire que l'on ne s'improvise pas féministe à la demande...