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*Rouvrir les maisons closes?

--> Débat
Rouvrir les maisons closes?


Femmes en maison (Henri Oltramer, 1900)


-> Une info lue sur: lejdd.fr


Depuis la fermeture des maisons closes en 1946, régulièrement, des voix s'élèvent pour rétablir "bordels" et autres "lupanars". En 2002, Françoise de Panafieu se prononçait pour. En novembre dernier, Christine Boutin aussi… avant de se rétracter. Cette fois-ci, c'est la députée UMP de Seine-et-Marne Chantal Brunel qui rouvre le débat. Dans un livre publiée jeudi (1) et une tribune publiée dans Le Monde , elle prône une réouverture "minutieusement contrôlée" de ces établissements. Selon la députée, la loi contre le racolage de 2003 n'a fait que fragiliser les prostitués, en les contraignant à se cacher. Les maisons closes auraient donc l'avantage de leur offrir une "protection médicale, juridique et financière". Nous avons soumis cette proposition, d'une part à Samuel Prieur, du Mouvement du Nid, une association qui aide les personnes prostituées. D'autre part à "Cadyne", membre du Syndicat du travail sexuel (Strass).


Chantal Brunel justifie sa proposition par une dégradation de la situation des prostitués. Partagez-vous ce constat?
Samuel Prieur: Tout à fait. Dès 2003, le Nid a condamné les lois sur le racolage. Elles ont obligés les prostitués à se cacher, pour aller à l'extérieur des villes, dans la clandestinité, sur Internet. Ces personnes sont moins protégées contre les actes de violence. Quelqu'un qui a pris un PV pour racolage sur la voie publique aura plus de mal à porter plainte s'il lui arrive un accident quelques jours plus tard… Avec cette loi, on s'est donc attaqué à l'aspect le plus visible du problème: les prostitués. Et pas au proxénétisme. Les politiques ont simplement balayé devant les portes pour répondre aux riverains qui criaient fort, pour faire plaisir à l'électorat.

Cadyne: Nous vivons une répression intolérable. Les amendes et les gardes-à-vue se sont multipliées. En cas d'agression, les filles hésitent à porter plainte. Les violences se sont aggravées. Et l'interdiction du racolage a développé un proxénétisme de lieu, du territoire: il faut payer pour travailler dans certains endroits.

Justement, des maisons closes ne pourraient-elles pas offrir une plus ample protection aux prostitués?
SP: Cette idée, qui revient régulièrement, est une éternelle tentation. Mais, en voulant protéger ces personnes, on risque de les soumettre à une plus grande violence. Faire une telle proposition témoigne d'un manque de réflexion. Dans les pays qui ont rétabli les maisons closes, aux Pays-Bas ou en Allemagne par exemple, le bilan est catastrophique. On y retrouve les problèmes qui ont conduit à leur fermeture en 1946. Il faut voir ce qu'est un bordel! Les filles sont enfermées, parfois 24 heures d'affilée, avec des clients qui s'enchaînent. Elles sont à la merci des propriétaires, dont le seul moteur est l'argent, et qui n'ont pas intérêt à les défendre face aux clients. C'est un peu simpliste mais, au moins, dans la rue, les filles peuvent prendre leurs jambes à leur cou! L'argument sanitaire est tout aussi hypocrite. Au mieux, les clients peuvent être obligés de prendre une douche. Mais on ne va pas leur demander de produire un test VIH à l'entrée ! En revanche, quand une fille a une MST… elle est exclue.

C: Quand on parle de maison close, on évoque un système précis, celui qui existait avant la loi Marthe Richard de 1946, avec des établissements surveillés par l'Etat, un contrôle de la Ddass, des fichiers sanitaires qui enfermait les filles dans un système très dégradant dont il était difficile de sortir. Aujourd'hui, aux Pays-Bas ou en Allemagne, on parle plutôt d'"Eros center". C'est peut-être un peu mieux que ce qui existe en France à ce jour. Peut-être. Mais ce n'est pas idéal. Les politiques qui remettent cette proposition sur la table, peuvent être bien intentionnés, mais leur solution est un peu bateau. En effet, il existe des dérives dans ces établissements. Dans certaines villes d'Allemagne, une seule société peut contrôler toutes les maisons. Impossible, donc, pour une fille mal payée ou mal traitée, de menacer d'aller ailleurs. Le propriétaire est tout puissant. Aux Pays-Bas, la loi va jusqu'à préciser le degré auquel doivent être lavés les sous-vêtements...! Nous refusons cette infantilisation passéiste et, globalement, ce contrôle de la relation client-prostituée par une personne extérieure, qui laisse la place à toutes les formes d'oppressions.

Que proposez-vous alors?
C: Nous souhaiterions un système qui mette au cœur la travailleuse. Avec, d'une part, une plus grande liberté d'exercer. Il faut arrêter la répression, les lois de droit commun suffisent pour réprimer le proxénétisme. De l'autre, une plus grande protection sociale, la possibilité de cotiser pour la retraite, ce qui est aujourd'hui très compliqué. Nous aimerions aussi plus de bienveillance des autorités. En Suisse, des prostituées peuvent avoir un studio avec un bouton qui leur permet d'alerter immédiatement le commissariat en cas de problème.. Et s'il doit y avoir des maisons, il faudrait qu'elles soient auto-gérées par les filles, avec une réglementation intérieure co-décidée. Bref, nous sommes contre les maisons-closes… et pour des maisons "ouvertes"!

SP: La légalisation crée un appel d'air, développe le trafic parallèle. Pour les proxénètes, devenus chef d'entreprise, c'est idéal. En France, la police estime qu'il y aurait entre 18 000 et 20 000 prostituées. En Allemagne, 400 000… Et 15% seulement des bordels seraient légaux. Ensuite, pour nous, la prostitution n'est pas un travail comme un autre. Les prostitués qui défendent cette position tentent, dans la plupart des cas, de s'auto-convaincre, ou répètent ce que demande leur proxénète. Les autres ne parlent que pour elles.

Ce refus de reconnaître la prostitution peut sembler idéaliste…
SP: L'abolition de l'esclavage aussi pouvait sembler utopiste. Mais dans notre utopie, nous sommes pragmatiques. Nous estimons qu'il y a quatre axes d'action nécessaire. D'abord aider ces personnes à trouve un avenir hors de la prostitution. Ensuite, réprimer plus durement les proxénètes. Nous avons en Europe de très bons services de police, mais quand il y a arrestation, les jugements sont ridicules ou ne sont pas appliqués. Troisièmement, inverser la charge pénale, en condamnant le client, ce qui n'arrive jamais. Enfin, faire de la prévention pour agir sur les mentalités du grand public.

(1) Pour en finir avec les violences faites aux femmes , Editions du Cherche-Midi.


-> Lire également sur post-Ô-porno: *Travail du sexe : Mais que nous prépare l’UMP ?


Ecrit par post-Ô-porno, le Samedi 30 Janvier 2010, 11:44 dans la rubrique "Prostitution".
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